[♦. Les contraires s'attirent. Vrai ou faux ? - PV]

♦ Songe et Psycho ♦

« Les contraires s'attirent. Vrai ou faux ? »

Tu cours, tu sautes, tu rues. La forêt est comme un terrain de jeu pour toi. Un endroit sûr où les malheurs de la vie ne sauront t’atteindre. Un endroit ou rien n’a d’importance, si ce n’est de s’amuser. Le vent te fouette le visage. Si fort, si doux, tu fermes les yeux et t’arrête un instant. La vie que tu mènes est la plus belle qui soit. Tu te lève quand ut le veux, dis ce que tu veux. Tu hurle ta joie au soleil et te goinfre de bon fruit bien mur. Les fleurs colorées qui t’entourent se prennent dans tes crins, la lumière fait briller ta robe. Une belle journée qui commence par la chaleur d’un rayon de soleil qui se pose sur ta robe. Un si belle journée que même les plus beaux mots ferait pâle figure à côté. Rien qui ne puisse être décrit par ton vocabulaire. Même l’être le plus sage, le plus intelligent, le plus cultivé, ne pourrais tourner une de ces belles phrases qui décrivent à la perfection ce que tu ressens, car l’émotion qui t’enivre depuis ta renaissance est bien plus forte que cela.

Et tu repars. Comme a ton habitude. Tu passes tes journées à savourer ta liberté. La joie qui émane de ton être pourrait rendre heureux le plus triste et désespéré des animaux. L’écho de ton rire persiste dans les bois tandis que tu galopes plus loin. La forêt laisse petit à petit place à la plaine et sans pouvoir te contenir, tu te roules dans l’herbe haute. La rosée s’accroche à ton pelage. Attiré par ta robe scintillante, un papillon se pose sur tes naseaux, te faisant éternuer. Ses ailes orange vibrent un moment, le papillon s’envole dans les airs, et tandis que tu plisses les yeux pour l’apercevoir, il disparaît dans un rayon de lumière. Un sourire accroché au lèvres, tu trotte dans la plaine, levant les sabots bien haut pour ne pas que l‘herbe te chatouillent les membres. Tu te fiches de ce que penses les autres, car tu sais que tout ce qui compte désormais, c’est ton bonheur.

Un point d’eau se dessine au loin. Tu avances, y trempe tes sabots, puis bois avidement l’eau fraîche qui te rafraîchit les membres.

La brume se lève au dessus du lac, s’épaissit, mur opaque qui te bloque la vue. Tu bois une dernière gorgée et lève la tête pour regarder les alentours. Le lac s’agite, les vaguelettes accélèrent. Tu recules de quelque pas, sort de l’eau et plisse les yeux. Un point lumineux vole au milieu du brouillard, t’intrigue. Tu fais quelques pas en avant. Des gouttes d’eau sautent de l’eau, bondissent de tout côtés, t’éclabousse le ventre. Puis tu t’arrête net : un rire retentit dans la brume, telle une voix qui flotte dans l’air. Il n’y a aucun bruit : le vent s’est arrêté. Les oiseaux se son tu au son de cette voix qui te donne la chair de poule.

Tu aperçois des yeux qui te fixent. La vent souffle une légère rafale, t’apporte l’odeur d’un cheval. Il t’observe depuis le début, ombre dans l’obscurité qui observerait tous tes gestes. Le vent souffle de nouveau, de plus en plus fort. Un tintement retentit et tu as de nouveau l’impression de l’entendre. Ce rire, un rire froid. Non pas ceux qui exprime la joie. Non. Un rire qui signifie la souffrance, le mal. L’émotion qu’on ne peut contenir, qui sors sans qu’on le veuille. Qui est-il ?

La brume s’affine. Il donne l’impression de s’être roulé dans du sang. Ses yeux rouges te fixent toujours, te font frissonner. Un rictus déforme sa bouche. Son pelage noir se fond avec le paysage. Il lui manque des touffes entières de crins mais une croix y est toujours accrochée. Son pelage est presque entièrement brulé, le poil repousse à peine. Sur sa croupe, une plaie ouverte te donne envie de rentrer six pieds sous terre. Tu le fixes et à l’impression de voir le feu de l’enfer brulé dans ses yeux, comme s’il en était prisonnier. Et alors ta bouche s’ouvre en une légère grimace que tu ne peux contrôler, et tu essaye de la caché en disant la phrase la plus grossière qu’une jument puisse dire à ce moment précis. « Que vous est-il arrivé ? »

Tu t’en mors les lèvres, détourne le regard.

La honte. Voilà ce que tu ressens à ce moment. Tu aimerais disparaitre et ne jamais exister. Même si tu ne connais pas ce cheval, même si c'est la première fois que tu le vois, tu sais que tu lui dois le respect. D'une pars parce qu'il est ton ainé, mais aussi parce qu'il a vécu plus de choses que toi. Ses connaissances pourrais te servir un jour où l'autre. Tu sais au fond de toi qu'il ne voudra plus jamais te parler mais tu reste là et te décide enfin a le regarder.

Il secoue la tête, pose son regard sur toi puis approche. Un pas, deux pas, sa croie rebondi sur son encolure, ses yeux de sang te fixent sans relâche. Tu tremble légèrement à la vue de cet étalon, mais finis par reprendre le contrôle. Tu te grandi un peu et le regarde dans les yeux toi aussi, sans détourner ton regard une seul seconde de son corps brulé, de son cœur en cendre. Il rigole, son rire résonne dans l'air, vibre comme le cri d'un blésé. Rire de la nuit, de la tristesse, du désespoir, de la mort. Il s'arrête devant toi, te crache son haleine fétide au visage. « Part ... »

Partir ? Cet idée te tente. Mais tu refuse de reculer, tu refuse de le quitter alors que le poids de ce que tu lui a dis te pèse encore, te pèsera toujours. Ses yeux reflètent des émotions qui changent, le désespoir, puis la colère. Que va-t-il faire ? Tu le regarde, ne bouge pas, parle d'un ton calme. « Veuillez m'excuser, j'ai été fort impolie. Je n'aurais jamais dû parler ainsi, et veuillez bien me croire que je ne recommencerais pas. Mais je ne partirais pas parce que vous me lavez demandez. Je ne suis pas venu ici pour repartir. Et je suis sur que je peux vous aidez à faire quelque chose. » Tu te détourne et fais quelque pas dans l'eau. La brume se lève entièrement, le soleil pose ses rayons sur ta robe alezane.

Tu bois encore quelques gorgées d'eau fraiche puis relève la tête. Tu regarde l'étalon puis te tourne de nouveaux vers lui, fixant ton regard dans le siens sans ciller. Tu n'as plus peur de lui, car il est inoffensif. Du moins pour l'instant. Alors tant qu'il est là, qu'il ne veut pas te faire de mal, tu décide de lui parler. Parce qu'il a besoin d'aide. Tu n'es surement pas la plus qualifié pour l'aider, mais tu dois au moins essayer. Il est partie de ton espèce, et sans entraide, qu'est-ce que l'on deviendrais ? Tu pourrais avoir besoin d'aide toi, un jour. Et si tu n'aide pas, ce ne sont pas les autres qui vont faire le premier pas. La rancune, c'est comme ça que ça s'appelle. Et toi, tu t'en voudra. Tu les regardera mais ne verra aucune pitié dans leurs yeux. Juste ... De la colère.

La colère qui les enivres, nourris pas une envie de vengeance. Une envie de se venger de ta présence ... Ou plutôt de ta non-présence. « Puis-je tout de même savoir votre nom ? »

Il a l’air surpris par ta question. Tu te dis que ce n’est peu être pas courant ici : peut-être que les chevaux s’ignorent, chacun ayant peur de se mêler des histoires des autres. Peur de trop en savoir, peut de ne pas savoir quoi dire. Vous vous regardez dans les yeux, chacun essayant de lire dans les pensées de l’autre. Mais vous ne vous connaissez pas assez. L’ignorance ce trouve entre vous : votre histoire, votre passé, votes présent, tous est inconnus à l’autre, et peut-être est-ce mieux ainsi. Peut-être êtes-vous seulement deux chevaux avec un lien sans lendemain. Une rencontre d’un jour, d’une nuit, qui s’arrêtera quand les rayons du soleil s’immisceront entre vous. Vous êtes comme deux solitaires, marchant droit devant vous. Vous rencontrez des gens merveilleux, qui vous font sourire et rire. Vous rencontrez des gens qui, le soir tombant, vous disent au revoir et s’en vont. Ils quittent votre vie, mais pas votre mémoire, et le soir avant de dormir, vos dernières pensées sont pour lui. Lui, cet inconnu que vous n’avez pas eu la chance de connaître, cet inconnu qui s’ai fait une place dans votre cœur sans vous en demandez la permission.

L’étranger fait un pas en avant. Il marche vers toi, parcourant la distance qui vous sépare, rentrant dans les rayons de soleil. La lumière se déverse sur son pelage de jais, et au fur et à mesure que ses pas le mènent vers toi, tu as l’impression de voir des fissures se refermer. « Impolie, vous, aucune importance, vous vous êtes excusez. Il n'y a donc aucun souci. » Tu lui souris. Pas un faux sourire, comme les gens en servent à tous bout de champ. Pas un sourire forcé pour réconforter, par un sourire impoli pour se moquer, pas ce sourire qui sert à faire semblant de s’amuser. Non. C’était un vrai sourire, celui qui arrive inconsciemment, celui qu’on ne peut cacher. Celui qui se plaque sur votre visage et qui ne veut plus vous quitter. Un vrai sourire de joie. Il a accepté tes excuses et pour l’instant, c’est tout ce qui compte.

Il est juste à côté de toi quand il répond à ta dernière question. « Psycopathe, tel est mon nom, et le votre chère demoiselle ? » Tu n’as pas peur de lui répondre. Ce n’est pas normal, de ne pas avoir peur de lui. Ses yeux ont la couleur du sang, sa croupe est brûlée jusque la chair. Mais au fond, sous ce physique de démon, se cache un être proche d’un ange. Tu le sais, contrairement à son apparence, Psycopathe est seulement … Un étalon. Un étalon qui, comme tous les autres, a besoin de contacte. Un étalon qui, même s’il ne veut pas l’accepter, a besoin d’amis, de connaissance, de gens qui l’apprécie pour ce qu’il est, et non pour ce qu’il veut montrer de lui. Il a besoin de gens qui pense à lui d’abord et à eux après. « Songe d’une Nuit. Tel est le nom que m’a attribué ma mère. Mais vous pouvez vous contentez de Songe, si vous le voulez. »

Tu baisses la tête et ouche l’eau du bout de ton museau. Des cercles se formes, parcoure l’eau en vibrant avant de s’écraser contre tes pattes. Tu aspires le liquide clair et en bois quelques gorgés puis relève la tête. « Si voulez me dire qui, ou quoi vous a fait ça, je suis toute ouïe. Mais si vous ne le désirez pas, je comprendrais et ne vous importunerais plus avec cela. » Tu ne sais pas s’il va bien le prendre. Tu ne parles pas de son pelage taché de cendre, de ses brulures à la croupe ou encore de ses crins manquant. Non, tu lui parles de l’étincelle dans son regard que tu ne vois pas. Tu ne parles pas de l’extérieur, mais de l’intérieur. Tu parles de son cœur brisé, de son âme qui souffre. Le corps se blesse, se renouvèle, puis oublie. Mais l’esprit n’oublie pas. Il se remémore sans cesses les mensonges que l’on t’a dis, les moments où on t’a fait de la peine. Il n’oublie jamais ces jours où on a perdu un être cher, où on a pris une décision qui a provoqué la mort. Il n’oublie pas la honte que l’on ressent, il n’oublie pas se sentiments de ne pas être à sa place, d’être détesté, d’être un danger. Tous ceux qui disent que l’ont oublie mentent. On se rappelle toujours de tous. On apprend seulement à vivre avec.