Not made to meet someone [Dangerous]

Lorsque mes forces me permirent de ressasser de mon sommeil, j’étais encore gauche et déséquilibrée en me dressant sur mes membres frêles. Ma tête tournait à cause du manque de nourriture que je venais de combler. Le soleil était alors à son zénith, et faisait briller la surface gelée du cours d’eau qui était troué en son milieu tout comme la surface blanche qui couvrait toute la vallée, lui donnant une atmosphère de recueillement et de paix. Toute cette luminosité m’éblouissait, tant par la blancheur que par la beauté, tout semblait magnifié et attrayant à la rigolade. Je me mis en marche quand j’entendis un craquement dans la neige derrière moi, je me stoppai, n’osant pas lancer un regard vers la source de mon angoisse. J’avais beau avoir eu beaucoup de foi ce genre de frayeur à cause de simple biches, rien ne contrôlait mes angoisses et ma phobie de « l’autre ».


Qui était cet « autre » ? Un simple poulain innocent qui me rappelait cette époque de joie et d’ignorance avec ma mère, un étalon fort qui me rappelait celui qui l’avait tuée, une autre jument qui me rappelait que je n’avais rien et que j’étais seule. Cet autre, ces autres, c’était tout ce qui m’angoissait, j’étais comme l’agoraphobe plongé dans le souk quand je me trouvais face à quiconque, et c’est à ces moments précis que je n’étais plus moi-même…

J’entendis alors sa vois retentir, ce qui me fit frémir violement.

« Ne crains rien, je ne te veux pas de mal … je me présente je m’appelle Dangerous ! »
Rien que son nom me donna envie de fuir, « Dangerous » ne représentait que le risque et le danger dans mon esprit. Ce simple nom m’avait fait ne pas analyser ses paroles pourtant rassurantes. C’était la première fois depuis tellement longtemps qu’on m’adressait la parole et je ne savais plus ce que ça faisait, et ni comment je devais réagir. Je restai alors muette et ne bougea pas, j’étais confuse dans mon esprit et ne savait pas si je voulais le voir partir, ou qu’il continue à me parler. La peur qu’il s’avance était toujours bien présente, et j’étais prête a m’enfuir de cette vallée en neigée. Je n’entendis plus rien, puis son ombre proche de moi, je n’eue pas le temps de m’enfuir qu’il se remit a me parler.
« Tu es seule ? Qu'elle est ton prénom... ? Tu sais tu n'as pas à avoir peur... Je suis un étalon sensible & je n'aime pas la brutalité. »
Je ne savais pas quoi lui répondre, je n’osais plus partir, ni me retourner vers lui, je baissai ma tête de lassitude et soupira et méditant à ma réponse. Après un profond silence je me redressa et lui dit d’une voix tremblante et incertaine
« Je ne me souvient pas de la dernière fois où j’ai eu quelconque compagnie »
Je mentais, c’était horrible, mais je laissais un espace entre nous dans ce mensonge.
« Tu es un étalon… tu ne peux pas être bon. »

Puis dans un frémissement et une image qui me renvoya a cette nuit, et partis au grand galop sans même me retourner.

Je m’enfonçais dans la neige à mesure que j’avançais, et je n’avançais presque plus quand je l’entendis me crier
- S'il te plait attend moi !!! J't’en supplie croit moi ! Je ne suis vraiment pas pareille. !!!!
Il me suppliait de rester, personne ne m’avait encore supplié. Au paravent quand on me demandait quelque, c’était de jouer, ou de rejoindre ma mère, là on me suppliait de rester avec quelqu’un. Lorsque que je n’eus plus la force de fendre la neige et qu’aucun autre moyen de fuir cet étalon, je cessai de me débattre –car c’était plutôt cela que je faisais plutôt que de galoper-, et entendis ses propres craquements dans la neige, je n’osais me retourner et ferma les yeux.
Lorsque je senti sa présence proche de moi, je fus forcée d’ouvrir mes yeux, un frisson d’angoisse de saisit mon encolure se dressa légèrement et mon épine dorsale se raidit jusqu’à la pointe de ma queue la redressant. Mes oreilles se plaquèrent sur ma nuque, bien que mon regard, s’il l’avait vu, lui aurait tout de suite indiqué à quel point j’étais terrorisée et incapable de faire un mouvement. Son souffle était maintenant presque dans mes oreilles, et je fis s’engouffrer dans mes poumon une bouffée d’air qui me glaça et je ne sus quoi dire.

Il était tout près de moi et l’instinct me hurlait de m’enfuir, mais mes sabots étaient ensevelis sous une masse abominable de neige, jusqu’à mon ventre. Je me fatiguais à me débattre vainement, décida d’arrêter là. S’il avait été mauvais, il m’aurait tué, mais si je continuais, ça serait la neige qui allait s’en charger. Mourir d’épuisement, frigorifié dans la neige, voilà une mort horrible. J’entendis son souffle frôler mes oreilles, et je voyais la fumée qui se dégageait de ses naseaux s’évaporer dans l’air.

« Pourquoi tu me fuis ? J'en ai marre que toute les juments vous me preniez comme un cruel coureur de jupon, Je n'en suis pas un !! Croyez-moi... Vous ne pensez pas que cela ne fait pas mal quand vous me dîtes ça ? Vous croyez toute que chacun de nous des que nous vous croisons vous sautons dessus et vous collons un Poulain et repartons comme ça ? Mine de rien ? Eh bien désoler ce n'est pas mon cas. »

Il se justifia tant et si bien que je crois que je finis par le croire. Je m’arrêtai alors tous mouvements de jambes et de tête, et ne chercha plus à me dépêtrer de ce piège de glace. Je tremblais j’étais gelée et trempée par la glace. Je repris ma respiration et lui adressa le moins de mots possibles

« Ce n’est pas ta faute… juste ma vie qui est comme ça. Sauves toi je me débrouillerais ! »

Puis j’arrêta de bouger et attendis.